Actualités / Cultures - mardi 21 janvier 2014

Tartuffe toujours vivant

S’inscrire dans la lignée de ceux qui s’attaquent à des chefs d’oeuvre n’effraie pas Laurent Vercelletto, directeur du Luca théâtre, qui passe sans sourciller des textes classiques aux contemporains. Peu importe le sujet, pourvu que soit présent l’esprit d’une oeuvre… or tartuffe fournit matière à réflexion, sans prendre une ride depuis sa première représentation. C’était au château de Versailles en 1664 et Louis XiV avait applaudi la pièce, présentée comme une comédie. Le Roi-Soleil n’avait pas ri longtemps puisque interdiction fut faite à Molière de donner des représentations publiques, l’archevêque n’ayant pas apprécié que ses ouailles soient ridiculisées à travers le personnage d’un orgon fanatisé et celui de ce tartuffe manipulateur dont le nom est devenu le synonyme d’hypocrite.

Oh la barbe !

Le contexte a changé, nul ne s’aviserait aujourd’hui d’interdire ce spectacle- là ! tartuffe est joué par Roland Depauw et orgon par Philippe Vincenot, deux très bons comédiens. “Orgon et Tartuffe, frères de religion, porteront le même costume, la même barbe exhibée et les mêmes cheveux très courts. La barbe reste, symboliquement et physiquement, un attribut essentiel de la domination masculine…”, note le metteur en scène dans sa présentation. effectivement, en 350 ans, les choses n’ont guère évolué du côté de la barbe et de la toutepuissance masculine érigée au nom de Dieu. Heureusement qu’il y a la servante Dorine (interprétée par la remarquable Christine Brotons), une Dorine ingénieuse qui ne s’en laisse pas conter par les bigots...

Le tartuffe est annoncé comme une comédie. Et pourtant, une comédie qui traite de sujets aussi sensibles hier qu’aujourd’hui : l’intégrisme religieux, l’enfermement idéologique, le risque qui plane d’un mariage forcé, le tout sans rien perdre de l’ironie mordante du texte. Car on rit et d’un rire libérateur. Dans le décor dépouillé à l’extrême de Charles Rios, les acteurs se meuvent en dévoilant, au sens propre et figuré, des situations cocasses ou intenables. Rendons hommage, écrivait une critique lors de la création de ce tartuffe aux 5C en 2012, “à la diction parfaite (des acteurs) qui permet d’entendre ces alexandrins comme s’ils avaient été écrits hier”. Ce tartuffe 2012 a connu un beau succès public. il sera en tournée en France, de Verdun à Miramas, après sa reprise aux 5C.

Françoise Kayser

Pratique : tartuffe par le Luca théâtre, au centre culturel Charlie-Chaplin, place de la nation. Mardi 28 janvier à 20h30, mercredi 29 et jeudi 30 janvier à 19h30, vendredi 31 à 20h30.

Photo © J-L Bertheau

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