Actualités / Société - mardi 15 décembre 2015

Laïcité : premier grand principe républicain pour les Français

“MERCI MARIANNE”. Le 9 décembre, date anniversaire de la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat, ces treize lettres inscrites sur treize panneaux brandis par treize membres d’un collectif, place Bellecour, sont un écho au “Merci Marie”, illuminant chaque année la colline de Fourvière, du 8 décembre à la fin de l’année.

Selon l’institut de sondage Ipsos, pour beaucoup de nos concitoyens, en effet (plus de huit Français sur dix, soit 81% de la population), la laïcité en France est menacée. 46% des personnes interrogées considèrent cette valeur comme étant la plus importante, devant le suffrage universel (36%), et loin devant la liberté d'association (8%), la libre constitution des partis politiques (5%) ou la liberté syndicale (5%). Des chiffres en nette augmentation depuis les attentats parisiens du 13 novembre.

 

Des Vaudais en parlent autour d’une table.

“La laïcité, on la vit aujourd’hui comme une hypocrisie. Elle a perdu son sens. Chacun la définit comme il veut”, exprime Anis, un étudiant. “C’est une valeur attaquée au quotidien”, affirme de son côté un encadrant d’une structure d’éducation populaire. “Par exemple lorsqu’une enfant de sept ans dit à son animatrice : “Tu n’as pas le droit de danser car tu n’es pas une bonne musulmane”. Elle est également bafouée lorsque des maires, comme ceux de Béziers (extrême droite) ou Saint-Quentin et Ajaccio (LR) font installer une crèche de Noël au sein de l’Hôtel de Ville, contre les recommandations de l’Association des maires de France.

Face au terrain reconquis par le religieux, certains de ses défenseurs réclament un retour à ses fondements. Revendiquant une totale séparation et demandant l’abrogation de la loi Debré (1). Pour Farid et ses copains, “c’est une valeur à renforcer. Une grande brèche est ouverte qu’il est urgent de colmater. Il ne faut pas faire dans la demi-mesure”. Samia d’ajouter : “C’est un principe essentiel qui protège toutes les confessions et les non croyants”. Mais pour elle, il suffisait de s’en tenir à la loi de 1905. Comme le jeune Naïm, elle estime que “la loi sur le foulard a stigmatisé les musulmans” et comme tout interdit elle a été bravée, défiée par une part de la population en état de souffrance et en crise d’identité.

 

“Faire la différence entre tradition et pratique religieuse”
Le 9 décembre, à l’occasion de la journée nationale de la laïcité décrétée par le président François Hollande après les attentats en janvier contre Charlie Hebdo et un hyper cacher de la banlieue parisienne, différents établissements scolaires ou structures associatives de Vaulx-en-Velin ouvrent le débat. Au lycée Doisneau, la députée-maire Hélène Geoffroy répond à quelques questions préparées par des élèves de seconde dans le cadre de leur cours d’histoire. Des questions portant sur la relation entre laïcité et cultes et le positionnement des représentants de l’Etat : le maire participe-t-il a l’inauguration des lieux de culte ? Au financement des édifices religieux ? Comment a été financée l’église Saint-Thomas ?... Hélène Geoffroy explique comment en qualité d’élue de la République elle peut tout à fait participer à l’inauguration d’un édifice religieux et respecter la neutralité de sa fonction. Elle rappelle que “la construction d’un tel lieu repose sur les dons des fidèles”.

A l’interrogation d’une lycéenne portant sur la présence d’un sapin de Noël au sein de l’établissement scolaire, la députée maire répond : “Il importe de faire la différence entre ce qui relève de la tradition et ce qui est lié à une pratique religieuse”. Noël n’est pas qu’une fête religieuse, c’est le solstice d’hiver, c’est aussi un moment fort de rassemblement de la famille, auquel sont associés le sapin dé- coré et la distribution des cadeaux. Un sapin qui renvoie à l’arbre symbole de vie associé à un rite païen, développe Hélène Geoffroy, en poursuivant : “Il peut y avoir des sapins dans les écoles, mais je ne mettrai jamais de crèche à la mairie car cela relève d’une dimension religieuse”.

La laïcité doit rester un rempart contre tout fanatisme, toute manipulation et tout aveuglement. En séparant l’Etat du religieux, sans avoir aucun ressentiment contre la religion, la laïcité vise le rassemblement des hommes quelles que soient leurs opinions et convictions. “Il faut se focaliser sur ce qui nous rassemble, pas sur ce qui nous différencie”, dit Leïla une jeune vaudaise.

“Je suis farouchement attachée à la loi de 1905. C’est une protection évidente pour nous tous et pour le respect des libertés de chacun”, assure la députée maire.

La laïcité est une pièce maîtresse de la société française qui permet à chaque homme, chaque femme, croyant ou non, d’avoir sa place et de réaliser l’unité plurielle, autrement dit la fraternité. Ceux qui veulent effacer la pluralité, semer la détestation, la haine se heurteront à la volonté endurcie de ceux qui, voulant vivre ensemble, défendent l’altérité et n’arrêteront pas de tisser des liens.

 

Fabienne Machurat

 

(1) avec la loi Debré, 10 milliards d’euros de fonds publics profitent à l’école privée confessionnelle à 97% catholique (l’équivalent du salaire de 180 000 professeurs des écoles).

 

 CE QUE DIT LA LOI

Loi du 9 décembre 1905 (séparation des églises et de l’Etat)
Article 1
La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public.

Article 2
La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. En conséquence, à partir du 1er janvier qui suivra la promulgation de la présente loi, seront supprimées des budgets de l’Etat, des départements et des communes, toutes dépenses relatives à l’exercice des cultes (...).

Article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958

La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances

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